lundi 26 mars 2012

TEAM ONE - Episode 47

[Les cinq paragraphes ci-dessous appartiennent à cinq feuilletons distincts. Ces cinq paragraphes ne se suivent pas - mais font suite aux précédents épisodes des mêmes auteurs.]


(Suite de l’histoire n°1) “Il ne s’était rien passé de bien extraordinaire, quand il l’avait raccompagnée. Ils ne s’étaient pas trouvés irrésistiblement attirés l’un vers l’autre, ne s’étaient pas fougueusement embrassés sur un joli petit pont au-dessus d’une rivière aux eaux limpides. Ils n’avaient pas discuté pendant des heures, apprenant tout de l’autre en se tenant timidement la main. Pourtant, M. Alecheim sait bien que c’est là que tout s’est décidé, là qu’il a vraiment fermé les yeux pour ne plus voir qu’elle, et cette petite lumière dans son regard gris.

Quelques jours plus tard, son dernier élève lui donnait congé. Salomon raccrocha la cornette du téléphone, se demandant comment il allait faire.” (Alice Bé)


(Suite de l’histoire n°2) “” (David M.)


(Suite de l’histoire n°3) “Sans me dire un mot, il s'assoit à ma table, fais signe au serveur de s'approcher. « Il nous faudra une autre table, lui dit-il, on sera quatre. » Le serveur (le petit nerveux) fait glisser la table à côté et la colle contre la nôtre. « Moi, je vais prendre le saumon en papillote », dit encore l'inconnu, sans avoir jamais regardé la carte.
– Je, euh... Qui êtes-vous ? dis-je enfin.
– Ne vous inquiétez pas, je suis en avance, les autres, ceux que vous connaissez, seront là bientôt. Il y a beaucoup de circulation, sans doute à cause de ce week-end. Les gens qui font le pont partent tôt.
Je le regarde, bouche bée. Je remarque, à le voir de près, qu'il est couvert de fines cicatrices, sur les bras, les mains. Sur la joue, une autre cicatrice, plus grande, en forme de U, semble plus récente que les autres. Toujours comme si je n'étais pas là, il sort son téléphone, le consulte quelques instants, puis le pose sur la table.
Le serveur lui apporte son plat, et se tourne vers moi. « Je vais attendre que nos collègues arrivent », dis-je.” (FG)


(Suite de l’histoire n°4) “Des bras la tirent dans la camionnette, on l’inspecte soigneusement.

« Pas de mouchards ? »

On tire son téléphone portable de son sac à main.

« Vire-moi ça par la fenêtre. »

Elle se sent toujours sous l’emprise abrutissante de la stigmergie : stop, lui dit son cortex, ne bouge pas.

Ses sens sont libres, cependant. Elle peut voir et entendre. Seulement, sa volonté et son corps se ligaturent, aussi inertes qu’un pont au dessus d’une rivière de sensations et de pensées. « N’êtes-vous pas un petit cancrelat qui court sur mes cuisses ? », fait une voix à côté d’elle. Dans la pénombre, elle distingue un sourire mystérieux. Elle voudrait questionner : « Antoine ? »

Le véhicule a dû faire demi-tour. Elle n’imagine pas comment cela a pu être possible. On l’attache à un brancard. De sa mémoire monte un chant d’indien, celui qu’elle criait aux oreilles de Jiji, quand elle le ficelait à un arbre pour mimer son sacrifice.” (Louis Butin)


(Suite de l’histoire n°5) “***

Van Doorn ne se séparait jamais de ses deux téléphones portables, l'un pour la famille, claironnait-il, l'autre, ah ! Clignement d'œil et torse soudain bombé. C'était un assez petit homme, les cheveux blond-roux, les yeux bleu pâle, les mains longues et fines. Il fondit sur Arrow qui déjeunait seul et tard à la cantine, contrairement à ses habitudes, et s'assit sans y être invité, posant les deux appareils sur la table.

— Ça n'a pas l'air mauvais, ce que tu manges. Comment va ? Ça fait des siècles qu'on ne s'est pas causé.

— Une semaine, souffla Arrow.

— C'est ce que je disais. Comment va la brebis ?

— Bien.

— Il fallait que je te voie. Un protocole à reprendre. Si tu as le temps, bien sûr.

Un des téléphones se mit à vibrer. Arrow fixa longuement l'écran, le visage pâle et pointu qui y était apparu. Des baies vitrées du réfectoire, l'on voyait la route et la haute grille du labo.

— Mais j'aimerais bien que ce soit toi. Attends… Tu permets ? Allô ? Allô oui, mon lapin. Ça ne t'ennuie pas de rappeler ? … Oui ? Mais tu… Oui ?

Une petite voix grésilla par-dessus la table. Le matin même, Arrow avait inséminé Deirdre. Du bélier, il ne connaissait que le nom, Binder, et la qualité de mutant. La semence venait d'un labo anglais.

— Ces gamins, fit van Doorn avec un sourire d'excuse en reposant l'appareil sur la table. Tu es marié, Robert ?

— Stephen, dit Arrow.

— Ah, Stephen, pardon. C'était ma fille. Dix ans. Elle est prise au conservatoire de Salt Lake. Elle joue de la harpe.

Avec une paire d'ailes blanches, se dit Arrow, las, le nez sur son poulet au curry.” (Dragon Ash)