lundi 26 mars 2012

TEAM ONE - Episode 43

[Les cinq paragraphes ci-dessous appartiennent à cinq feuilletons distincts. Ces cinq paragraphes ne se suivent pas - mais font suite aux précédents épisodes des mêmes auteurs.]


(Suite de l’histoire n°1) “Ma pauvre Griselda, reprit David en se tournant vers la jeune
femme, je manque aux devoirs les plus élémentaires de la courtoisie.
Veuillez m’en excuser, ces jours-ci je tourne un peu en bourrique.
Venez donc vous asseoir, nous allons demander à ce que l’on nous
apporte à boire.
Ils se dirigèrent vers le petit salon, où, malgré la tiédeur de
l’air, brûlait un beau feu de cheminée. A côté du fauteuil en velours
où s’installa Griselda se trouvait un beau coffre en bois, fermé par
un solide cadenas. Elle le regardait avec curiosité. David le
remarqua, et dit d’un air indifférent :
- Oh, oui, vous vous demandez pourquoi tant de précautions. Il ne
s’agit que de vieux livres et de paperasses, auxquels mon père tenait
énormément, si bien qu’il les avait enfermés là-dedans. Cela fait des
années que personne n’y a touché. Le coffre est beau, donc nous avons
préféré le garder au salon. Quant au contenu, il a probablement été
dévoré par les insectes, depuis le temps.” (Alice Bé)


(Suite de l’histoire n°2) “” (David M.)


(Suite de l’histoire n°3) “Quoi qu'il en soit, l'homme plus âgé semble très mécontent, et le jeune homme frisé semble plutôt vouloir se justifier, expliquer ses actions. À tout moment, il ouvre les bras, paumes ouvertes, comme pour dire : « Mais qu'est-ce que tu voulais que je fasse ? »
La sonnerie de mon téléphone retentit : je viens de recevoir un texto. C'est Reinette. Elle m'écrit : « Viens au resto en métro. Change à Châtelet. Trop de monde, ils seront désorientés, ils ne pourront pas te suivre. Pas de souci. »
Je regarde de nouveau par la fenêtre, toujours avec la plus grande discrétion. Le jeune homme a disparu, il ne reste plus que le vieil homme. Toujours appuyé au platane, il a ouvert son livre et lit. Puis, se disant sans doute qu'il ne pourra pas rester bien longtemps comme ça sans attirer l'attention, il se dirige vers le café du coin.
Quand vient l'heure de partir, je décide de marcher à pas lents et de passer devant le café, sans chercher à éviter mon poursuivant, comme fait celui qui n'est pas pressé, comme fait celui que ne se doute de rien et ne sait pas qu'il est suivi. Comme prévu, il sort du café et commence à marcher derrière moi. Ses enjambées sont courtes et rapides : il marche comme une blatte.” (FG)


(Suite de l’histoire n°4) “— Je ferai ce que vous voudrez », soupire Coralie.

Elle considère tristement la portière de la voiture, verrouillée. La banlieue parisienne défile sous les vitres fumées : paysage d’immeubles, de sièges de PME et de hangars ; couleurs passées et ternies une seconde fois par le filtre du verre blindé. Depuis la hauteur d’un échangeur routier, son regard embrasse la Seine-Saint-Denis : à perte de vue, ce panorama anonyme et sinistre.

Le décor lui évoque le vocabulaire des gars de la sécurité. À les en croire, de toutes parts la guettent les « cafards », les « blattes », les « cloportes ». Tout le champ lexical y passe ! Le projet nocturne l’aura agité, ce petit monde grouillant. Et le chef de service qui se fait appeler Scutigera, comme le prédateur de ces nuisibles…

Coralie est mal à l’aise. Elle repense au film porno d’Antoine, avec ce petit page que la marquise étrangère appelait « cancrelat ». Angoisses d’espionnage, réminiscences de l’enfance, scènes crues de cunnilingus, les images se superposent, voilent le réel, comme des feuilles de verre de sécurité.” (Louis Butin)


(Suite de l’histoire n°5) “Elle pourrait peut-être, se dit-elle, sombrer dans l'alcoolisme ou du moins l'oubli chimique, puisque le rivage de Kamakura ne lui procurera pas — non plus que Daisuke — la fleur de lotus.

— Ah, se souvient-elle, contradictoire. Le µ-233, une des molécules en test au labo, celle que nous surnommions pilule de la mémoire sélective.

Elle y a travaillé.

— Dai-chan, après déjeuner, on pourrait aller voir le grand Bouddha.

Lequel, la chose lui revient lorsqu'ils franchissent la porte du temple, se protège du reste de la ville par une douve où s'étiolent des milliers de lotus et sans doute entre leurs tiges, des poissons aussi pâles que la colossale statue. Pour vingt yens on peut monter jusqu'à la tête du Bouddha et sans doute regarder la mer par ses yeux. Un milan s'est posé sur son chignon. Daisuke regarde Etsuko à la dérobée et se souvient d'une angoisse horriblement plaisante qu'il a eu cette nuit d'un nouveau tremblement de terre et d'une vague silencieuse qui les aurait balayés, sans douleur. Un insecte crissait dans la nuit ce qui l'a rassuré, hélas : la catastrophe attendrait.

— Dans la tête du Bouddha, songe-t-il maintenant, on est sauf à coup sûr.” (Dragon Ash)