lundi 26 mars 2012

TEAM ONE - Episode 20

[Les cinq paragraphes ci-dessous appartiennent à cinq feuilletons distincts. Ces cinq paragraphes ne se suivent pas - mais font suite aux précédents épisodes des mêmes auteurs.]



(Suite de l’histoire n°1) “C’était bien ainsi que tout avait commencé, par cette étrange soirée passée à naviguer entre un monde et l’autre. M. Aleichem s’en souvenait encore dans les moindres détails, alors même que son visage était aujourd’hui bien plus ridé que celui de Mme Cohen à l’époque, alors même qu’il ne pouvait plus marcher sans s’appuyer sur sa canne. C’était cette nuit-là qu’il avait mis le doigt dans l’engrenage, entr’aperçu par un trou de serrure ce qui allait le mener à sa perte. Et attirer sur lui le malheur et l’opprobre.” (Alice Bé)



(Suite de l’histoire n°2) “Dans l’avion qui me transportait, je scrutais le ciel étoilé, sa noirceur, sa simplicité et son ordre naturel. Je pris l’habitude, revenu dans la maison de ma famille, de me promener la nuit dans notre parc, à la recherche de cette solution, qui m’est apparue il y a quelques jours, alors que, tout occupé à mesurer l’écart entre la sauvagerie de la jungle indonésienne et la sérénité qui enveloppe nos jardins, je vis une colonne de fourmis, qui escaladait un chêne. Je songeais sur le champ au merveilleux esprit d’enfance de Méliès, je m’étonnais du fantastique esprit de résistance des insectes, que même le brave Géronimo n’égalait pas - et devant cette anarchie pleine de vie, je languissais après la clarté mathématique du mode magique de Turing, un mathématicien dont le destin tragique, que vous connaissez sans doute, m’émeut, et me fait chaque fois sentir combien les hommes sont méchants, et les personnalités d’exception, comme moi, persécutées. ” (David M.)



(Suite de l’histoire n°3) “Nous arrivons enfin à l'aéroport. Je compte bien profiter de ces heures d'attente, mais à peine installé sur un siège près de ma porte, je m'endors.
Dans l'avion, les questions continuent à m'assaillir : devrais-je me rendre à Moussart ? Mais pourquoi ? Je n'ai rien à y faire, rien à y trouver, je n'y connais personne. Devrais-je peut-être me rendre à Cannes ? De nouveau, pourquoi ? J'y ai vu Argus une fois, mais il n'y habite pas, que je sache. Non, c'est à Paris, et à Paris seulement que j'obtiendrai des réponses. Je crois qu'il faut que je prenne Reinette en filature, mais avec la discrétion la plus complète, la plus absolue. C'est le seul moyen, je crois, que j'aie de faire la lumière sur toutes ces énigmes.
Satisfait d'être parvenu à cette résolution, je feuillette un magazine, quand tout à coup mon regard est attiré par un nom : Paul Locus.” (FG)



(Suite de l’histoire n°4) “Elle posa le pot de glace et se baissa pour attraper l'appareil.

« Allo ? Allo ??... Antoine ?... mais qu'est-ce que tu fabriques ?... Attends. Je ne comprends pas. "Un avion dans la tête" ?... Une pierre ?... Oui. Quoi ?!... "Un inconnu sous la lune" ? Mais qu'est-ce que tu racontes ? Quoi, la serrure ? Tu es où ?... Tu ne sais pas ?... Tu as perdu les clés. Qu'est-ce qu'il y a ?... Tu ne vois plus rien ? Bon, allez, ce n'est pas drôle, là. Tu me fais peur. En plus, tu m'as laissée avec un film porno stupide. Je ne suis plus du tout excitée. Pardon ? Que je vienne te chercher dehors ? Non, je regrette. Rrrh ! Toi et tes scénarios érotiques à la manque !... Comment ça, Il est dans la maison ? »

Elle regarda furtivement de tous côtés.

« Arrête ! Arrête d'essayer de me faire peur, ça ne marche pas ! tu... tu es un sale pervers ! Je ne comprends pas pourquoi je me suis laissée attirer par un... un sale cloporte pervers ! Antoine, tais-toi ! Je ne t'écoute plus ! tu me rends les clés et je ne veux plus rien avoir à faire avec toi !»” (Louis Butin)



(Suite de l’histoire n°5) “…. Le docteur Quevedo Cerny.

— Désolée, dit Etsuko. Je ne vois pas du tout…

— Ah ? Je travaille au laboratoire de linguistique de Santa Fé. Sur la synthèse vocale. Non ?

— Non."

Etsuko ment sans vergogne. Elle n'a jamais rencontré Cerny, mais a lu quelques-uns de ses articles sur la vocalisation des cris d'animaux. Deirdre, la Deirdre d'Arrow, vient du labo de Santa Fé.

La voix de Cerny grésille dans le vide. Etsuko n'écoute plus. La lune se reflète curieusement sur l'écran du téléphone ; Etsuko voudrait s'asseoir devant la porte du Cabaret de l'amour — quel nom à la con — et la regarder flotter dans le ciel noirâtre, jamais clair à Tokyo.

"Professeur Kagi ? Professeur Kagi ?"

Mais allez au diable, tous. Je vous hais. Deux jolis garçons qu'on pourrait sans peine prendre pour les hôtes qui recrutent à deux rues d'ici surviennent en gloussant.

"Y a de la place encore chez vous ? On est les potes à Jo."

Entrez, entrez, potes à Jo. Bière pour tout le monde, ce sera ma tournée. La tête renversée, Etsuko suit des yeux un avion, puis un autre. Lève la main pour capter les néons du Aokai. Bleu, vert, violet, blanc, etc. "Aimant du chagrin… La douleur te colle aux semelles…" Qu'est-ce que c'est, déjà, cette stupide rengaine ? Un tube de Meiko Kaji, la femme scorpion, au moins. Ça y est, c'est gagné : Kagi Etsuko pleure, pour la première fois depuis le 11 mars. ” (Dragon Ash)